Tuesday, October 15, 2019

2019.10.33

Paul White, Gallus Reborn. A Study of the Diffusion and Reception of Works Ascribed to Gaius Cornelius Gallus. Routledge Focus on Classical Studies. London; New York: Routledge, 2019. Pp. 76. ISBN 9780367200596. $60.00.

Reviewed by Marie-Pierre Bussières, Université d'Ottawa (mbussier@uottawa.ca)

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Que voici une étude intéressante, bien écrite et bien argumentée sur la réception de Gaius Cornélius Gallus à la Renaissance. Dans l'espace d'une plaquette concise, mais approfondie, Paul White prend le parti d'explorer les raisons qui expliquent l'influence de Gallus et de ses pseudépigraphes (les Élégies de Maximien et le Carmen ad Lydiam), la manière dont les lecteurs de la Renaissance ont transformé le personnage de Gallus, ainsi que l'impact que cette figure et ces poèmes ont eu sur l'histoire littéraire.

White explique que les raisons qui ont mené à l'attribution à Gallus des poèmes de Maximien, malgré les doutes précoces et nombreux sur cette attribution, sont multiples. D'une part, Gallus avait été célébré par ses contemporains comme un maître et le fondateur d'un genre qui chante la jeunesse; or les Élégies de Maximien montrent un homme vieillissant déplorant des déconfitures amoureuses. La figure de Gallus est devenue à la fois le modèle élégiaque imité de ses contemporains et un poète en fin de parcours. De l'avis de White, ce personnage contradictoire permettait aux littérateurs de la Renaissance de faire de Gallus à la fois le précurseur et le dernier auteur classique du genre. D'autre part, les multiples allusions aux élégiaques classiques dans les Élégies et l'Ad Lydiam, ainsi que l'image du poète revisitant (le verbe recenseo est très présent dans la poésie de Maximien) ses Amores de jeunesse—les amours et les poèmes—créent un discours métapoétique évoquant un genre déclinant détaché du passé classique de l'élégie qui trouvait une résonnance particulière chez les hommes de lettres de la Renaissance, conscients de leur propre distance par rapport à ce passé littéraire (ch. 1 et 4).

Ces affinités intellectuelles et l'autorité du poète classique ont fait des Élégies et de l'Ad Lydiam des poèmes très imités pendant tous les quinzième et seizième siècles (ch. 3).

L'association du nom de Gallus avec les poèmes de Maximien a également transformé l'image de Gallus à la Renaissance, qui, de préfet d'Égypte mort par suicide à trente-trois ans, devint un soldat vieillissant contemplant son passé. Cette image transpire dans les allusions à Gallus et les imitations des Élégies et de l'Ad Lydiam chez les poètes contemporains et les auteurs postérieurs (ch. 2 et 4), mais aussi dans l'attribution à Gallus d'un poème, Non fuit Arsacidum tanti expugnare Seleucen, mettant en scène le poète de retour de la campagne contre les Parthes de Ventidius (39-38 a. n. è.) et déjà vieilli. Ce faux fut envoyé par Didacus Pyrrhus à Achille Statius et Alde Manuce, deux éditeurs qui avaient déjà été victimes d'un faux, l'Orpheus prétendument de Cassius de Parme. White pose l'hypothèse que Pyrrhus a lui-même écrit le poème et qu'une réédition de Non fuit Arsacidum quelques années plus tard, qui parut accompagné de poèmes de Pyrrhus, avait pour but de mettre la puce à l'oreille du lecteur afin qu'il reconnaisse la supercherie (ch. 5-6).

Un appendice dresse la liste des fragments et poèmes attribués à Gallus dans les éditions imprimées depuis la Renaissance.

Je tiens à souligner que le livre compte, outre l'introduction et la conclusion, six chapitres dont l'ampleur reproduit presque le rythme des poèmes de Maximien: un premier chapitre plus long, suivi de trois chapitres très courts et d'un cinquième plus développé. Seul le sixième chapitre échappe à cette aemulatio, mais il fallait étayer l'identité du faussaire avec soin.

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